J’aurai
pu intituler cet article : 2013,
millésime multiple. Tant l’hétérogénéité des vins produits en 2013 est
grande. Depuis des vins souples et plaisants jusqu’à de beaux vins mûrs et
denses, en passant par d’autres petits et dilués. 2013 ne sera pas un grand
millésime, on ne peut que le constater. Mais il n’est pas non plus le millésime
raté que certains voudraient nous attribuer. 2013 est multiple et révèlera de
nombreuses surprises. 2013 est surtout marqué par des manques liés aux conditions de l’année.
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La variabilité de couleurs des vins rouges illustre bien la diversité des vins 2013 |
Manque de Soleil
2013
est une année fraiche et humide. A part le mois de juillet, tous les mois de
l’année sont déficitaires en température.
2
périodes sont particulièrement marquées par le froid et l’humidité :
Mai - Juin :
- 3 °C par rapport à la moyenne en mai et + 50 % de pluie en juin entrainent
une faible initiation florale, une floraison avec 15 jours de retard et des
problèmes de fécondation avec coulure et millerandage.
Septembre – Octobre : des températures fraiches avec peu d’ensoleillement et une faible amplitude thermique entre le jour et la nuit, entrainent un manque de concentration des raisins en sucre, en couleur et en arômes. Par ailleurs, la pluviométrie élevée favorise le développement de la pourriture qui deviendra explosive dans certaines situations.
Manque de Volume
Les
températures douces de mi-avril avaient favorisé un débourrement généralisé et
homogène, avec une belle sortie. Mais le froid et l’humidité de mai – juin ont
conduit à une floraison difficile aboutissant à une perte importante de récolte
par coulure et millerandage.
Particulièrement
capricieuse, la météo s’est acharnée sur certains secteurs, meurtris par de
violents orages de grêle fin juillet – début août. 20 000 Ha seront
touchés, avec des pertes estimées à 300 000 Hl.
Liens : Solidarité et Un Conte d'Automne
Les rendements moyens en Gironde sont de l’ordre de :
Liens : Solidarité et Un Conte d'Automne
Les rendements moyens en Gironde sont de l’ordre de :
Blancs : 50 Hl/Ha soit – 10 %
Rouges : 35 Hl/Ha soit – 30 %
Cela
représente une perte globale pour la viticulture girondine de 1 million d’Hl !
Manque de Concentration
Manque de Concentration
Cela
peut surprendre de parler de manque de concentration pour des rendements de 35
Hl/Ha. Pourtant, la vigne bien alimentée en eau pendant toute l’année,
favorisant sa pousse sans période de stress, n’a arrêté sa croissance que très
tardivement. Le mois de septembre manquant de chaleur et d’ensoleillement, et
avec une faible amplitude thermique entre le jour et la nuit, a été peu
favorable à la concentration des raisins en sucres, en couleur et en arômes.
Par ailleurs, les problèmes de fécondation à la floraison, on conduit à des
raisins avec peu de pépins (0 à 2 par baies), libérant peu de tanins et donc
peu de structure. Constatations que l’on pouvait faire à la veille de la
récolte, par la dégustation des baies. ’’Une dégustation
attentive des baies révèle une autre indication : il semble que dans de
nombreuses parcelles, la matière ne soit pas très riche, pas très dense, pas
très expressive… signe non pas d’un manque de maturité mais plutôt d’un manque
de concentration.’’ Lien : Millésime 2013 : des vendanges difficiles message du 06 octobre
2013.
Manque de Maturité
On
évoquera souvent le manque de Maturité du millésime 2013. Il est vrai que
l’année est tardive et que l’on a parfois vendangé tôt, sous la pression
Botrytis. Il est vrai aussi qu’à la récolte, les jus des raisins présentaient
des Degrés un peu faibles et des Acidités un peu élevées, signes de manque de
maturité technologique. Mais il faut rappeler que la maturité qui nous
intéresse avant tout, est celle des peaux des raisins et des pépins. Et là, le
constat est tout autre. La vendange 2013 présente une bonne maturité
aromatique, avec absence de caractères végétaux (IBMP brûlé par la chaleur de
juillet/août) ; ainsi qu’une bonne maturité phénolique avec des pépins
mûrs, sans tanins astringents. Et ça, ce sont des facteurs de qualité !
Manque de Chance

C’est
bien là la principale limite du millésime : le Botrytis.
Nous
savions que la vendange 2013 serait fragile au Botrytis. Lien :
Potentiel de Réceptivité des baies de raisin au Botrytis en 2013
Nous
savions que nous avions besoin d’un temps chaud et sec. Mais la Nature a été cruelle
pendant toute l’année, jusqu’à la récolte. Certains terroirs n’y ont pas
résisté. Les sols filtrants de sables et de graves. Les parcelles les plus
précoces où la fragilité pelliculaire était la plus grande. Les sols labourés,
gorgés d’eau…
Mais manque pas de charme
Manque
de soleil, de volume, de concentration… n’y a t’il donc aucun point positif
dans ce millésime 2013 ? Et bien si, justement…
2013
est un millésime de rendements faibles. Facteur de qualité.
Moins
de rendement c’est aussi moins de cuves à travailler, et donc plus de temps
pour gérer chaque cuve au mieux.
Des
degrés moyens rendent les fermentations plus faciles, sans risques de déviation.
Une
bonne maturité des arômes et des pépins permet de bien conduire les
extractions, sans risque de caractère végétal où astringent.
Les
cabernets sauvignons ont moins souffert à la fleur que les Merlots. Leur cycle
a été plus ’’normal’’ et leur qualité est généralement supérieure. Ils forment
souvent les meilleures cuves du chai.
Enfin,
si certains terroirs, très précoces, ou tardifs ou filtrants ont souffert,
d’autres se sont très bien comportés. Ceux comportant une part d’argile
notamment. Ceux-là ont bien résisté au développement de la pourriture,
permettant d’attendre un bon niveau de maturité.
En
termes de vinification, peu d’options se présentaient au winemaker.
Soit
la vendange était dégradée et alors il fallait extraire en douceur, en essayant
de protéger la matière et de sauver les meubles. (On pouvait aussi appliquer
une thermovinification. Voir ma recette façon
poché ici : Comment "cuisiner" les MERLOTS 2013 ?).
Soit
la vendange était saine et il fallait faire le contraire. Extraire en force pour aller chercher couleur,
structure et concentration dans l’intimité du raisin. Extraire en douceur était
une erreur qui ne pouvait conduire qu’à de petits vins sans caractère et sans
charme.
Les
vins des meilleurs terroirs ne manquent pas de charme. Ils sont colorés, avec
des couleurs violacées franches et stables. Leurs nez expriment le fruit, sans
notes végétales. Leurs bouches sont rondes, assez denses, avec une bonne
longueur. Ces vins se comportent très bien en élevage, notamment sous bois,
gagnant concentration et ampleur. Ce sont des vins réussis de bonne qualité,
parfois supérieure à 2012.
Ces
vins ne forment certes pas la majorité du millésime. Pourtant, quand la protection sanitaire du vignoble a été bien gérée ; quand la date de récolte, ni trop tôt ni trop tard, a été bien choisie ; quand les bons choix de vinification ont été faits, on a pu produire de très bons vins rouges en 2013 !
La
plupart des vins sont plus simples. Souples, avec du fruit et de la fraicheur.
Des vins d’assez bon niveau, agréables et qui correspondent bien à la demande
du Marché.
Certains
enfin, sont dilués et sans personnalité, voire maigres et sans couleur, comme mangés par le Botrytis. Heureusement, il
ne s’agit que d’une petite minorité.
Manque de Confiance

Le millésime 2013 a déjà passablement été décrié, avant même les vendanges. Lien : «Le millésime 2013 est pourri, laisse tomber»
Aujourd’hui, certains parlent de ne pas venir goûter les Primeurs cette année. Ou de ne pas présenter aux Primeurs. Certains voudraient même qu’on annule les Primeurs de Bordeaux pour le millésime 2013 ! Ce bashing anti Bordeaux relève d’un certain manque de confiance.
Pourtant, nous avons à Bordeaux les meilleurs consultants du monde, lien : Top 10 influential wineconsultants
Derrière
2 ou 3 œnologues médiatiques, il y a 50 œnologues de talent à Bordeaux. L’œnologie
bordelaise fait référence dans le monde entier. Faites confiance à notre
savoir-faire !
Bordeaux
est une région aux conditions météo changeantes où chaque année il faut s’adapter. C’est à chaque fois de nouveaux défis. Notre rôle est de
nous battre, de surmonter les difficultés et de réussir nos vins, quelles que
soient les difficultés du millésime. J’ai déjà eu l’occasion de le dire pour le
millésime 2012 : il n’y aura plus de mauvais millésime à Bordeaux !
Le millésime 2013, pour autant imparfait qu’il puisse être dans les conditions
que nous a imposé Dame Nature, le prouve une nouvelle fois.
Quasiment d'accord avec vous, de A à Z. A suivre...
RépondreSupprimerMerci pour cette confiance anonyme mais pas aveugle...
SupprimerJe relève le défi du "à suivre" !
Retrouvez mon interview sur VITISPHERE :
RépondreSupprimerhttp://www.vitisphere.com/breve-62834-Millerande-botrytise-critique-malgre-les-outrages-le-millesime-2013-bouge-encore-a-Bordeaux.html
This iis a great post thanks
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