Septembre.
C’est la rentrée.
La
rentrée des classes. La rentrée politique. La rentrée littéraire. La rentrée
prochaine de la nouvelle récolte… C’est la période où on entend (ou lit) les
premiers avis sur le futur millésime. Ca y est, on y est, on sait tout… 2013 petit
millésime ? Petit en quantité ? Petit en qualité ?… Certains savent tout avant tout le
monde. Avant ceux qui vont vendanger. Avant ceux qui vont vinifier, qui vont
accompagner, créer le nouveau millésime. Ceux-là, les producteurs, les
techniciens, les consultants… ne savent pas. Pas encore. Ceux-là savent que la
Nature est complexe, multiple, et que rien n’est jamais joué d’avance. Que les semaines qui viennent sont fondamentales. Que ce sont elles qui
feront la personnalité du millésime. On saura lorsque l’on dégustera les
raisins, la veille de la récolte. Lorsque l’on vinifiera pour exprimer au
mieux le potentiel de cette récolte. Et surtout, en novembre, au moment
des écoulages. Là on saura, là je vous dirais.
Pour
l’heure, on ne peut pas vendre la peau de l’ours avant qu’il ne soit mûr… On ne peut que s’appuyer sur les faits, et en
premier lieu, sur les conditions climatiques qui ont accompagné la naissance de
ce nouveau millésime.
CLIMATOLOGIE 2013 - Station de Saint-Emilion (Source : Chambre d'Agriculture Gironde)
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en Rouge : données mensuelles
en Jaune : moyenne des 30 dernières années |
L’hiver
2012-2013 a été froid et humide.
Au
début du printemps, les sols superficiels sont proches de la saturation, les
températures sont froides. Puis les températures douces de mi-avril favorisent
un débourrement généralisé et homogène. On observe très peu de fenêtres et une
sortie importante des contre-bourgeons. Le vignoble apparait joli et généreux,
beaucoup plus homogène qu’en 2012.
Fin
avril - début mai, le retour du froid ralentit la pousse. Les températures de
mai sont exceptionnellement fraiches (- 3°C par rapport à la moyenne
trentenaire). Même si les précipitations sont souvent peu importantes, il pleut
pratiquement tous les jours. Ces conditions sont peu favorables à la pousse de
la plante qui apparait souvent pâle et chétive avec localement des problèmes de
carences minérales. Les inflorescences poussent plus vite que les feuilles,
ainsi les grappes apparaissent-elles souvent énormes. Ces conditions peu
favorables à la pousse sont également défavorables au développement des
maladies.
Juin est très perturbé. Début
juin, des températures plus douces favorisent la pousse, la vigne reverdit. S'en suit une période froide et pluvieuse qui fait craindre des problèmes de
floraison (Coulure et Millerandage). En effet, la
floraison se passe sur une période où la vigne est très poussante et les
précipitations importantes, avec une succession de journées chaudes puis
fraiches et une humidité moyenne > 70%. Le froid et l’excès d’eau bloquent
l’évolution. La nouaison progresse très peu, les baies restent petites. On
observe 15 jours de retard par rapport à 2012, et 2013 apparait comme l’année
la plus tardive depuis 1997.
Cette succession de périodes chaudes puis humides favorise le développement du Botrytis qui apparait dans de nombreuses situations, autant sur feuille que sur grappes.
En
juillet, on constatera les effets de ce printemps froid, humide et
particulièrement perturbé. Coulure et surtout millerandage affecteront de façon
très importante les cépages sensibles, entrainant des pertes de récoltes
importantes, ainsi qu’une très grande hétérogénéité entre les parcelles, et au
sein d’une même parcelle.
L’été
est chaud et sec et la véraison se passe dans de bonnes conditions. Mais la fin
juillet - début août restera marquée par de violents orages accompagnés de
grêle qui ravageront de nombreux secteurs (Arveyres-Génissac 26/27 juillet --- Entre-Deux-Mers et Castillonnais 02 août). 20 000 Ha de vignobles seront touchés, parfois ravagés à
100%. Plus d'informations ici.
Les
données du capteur de pollens de Saint-Emilion sont également riches d’enseignements.
Elles
permettent de situer les dates de Floraison ainsi que son étalement. Il faut
aussi rappeler que cette technique a été mise au point dans un objectif d’estimation
quantitative. L’aire couverte par la courbe de pollinisation 2013 montre que
peu de grains de pollen ont été captés dans l’atmosphère. Peu de pollen donc peu de
fleurs et donc peu de fruits. Même si ces données peuvent être remises en cause
selon la pluviométrie de l’été et de l’automne - qui peut faire varier la taille des baies - elles
indiquent, dès le mois de juin, que la récolte risque d’être déficitaire.
La ½ Floraison des Merlots s’étale du 15 au 25 juin selon la précocité des terroirs, soit avec 15 jours de retard sur 2012.
La ½ Véraison des Merlots est observée du 15 au 30 août, soit avec 10 à 15 jours de retard sur 2012.
Ces observations permettent d'envisager des dates théoriques de vendanges.
Suite
à ces constatations, voilà les seules conclusions que l’on peut tirer, dès à
présent, sur ce nouveau millésime 2013 :
Précocité : 2013 sera un millésime tardif et il faudra
savoir être patient avant de récolter
Quantité : 2013 sera déficitaire. Les dernières
estimations prévoient une récolte normale en Blanc et déficitaire en Rouge avec
des rendements de l’ordre de 35 Hl/Ha en Merlot. Soit un manque au niveau de la
production bordelaise de 1 million d’Hl !
Qualité : 2013 sera de qualité hétérogène et, une
nouvelle fois, le tri à la récolte sera l’une des clés de la réussite.
Pour
ce qui concerne le niveau de qualité des vins de 2013, rendez-vous en novembre…